Valt 6×6

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Valt

voiture à 6 roues

6×6 VALT Atnor Six roues qui se jettes à l’eau (Philippe Despit, l’Auto Journal, 1.4.1986)
Par vagues déferlant sans relâche, le vent, de ses gifles répétées, brutales, amples comme des claques de géant fou, plaque la pluie glaciale sur les vêtements gorgés d’eau et de sable. Les dents claquent sur les cristaux qui craquent. Le ciel de Dunkerque – que rendent plus opaque encore les brumes âcres d’Usinor – a bien fait les choses.
La plage aux eaux grises a pris ses nuances préférées, les couleurs du spleen. Parfait pour essayer un 6×6 amphibie : on est déjà trempé et transi avant même de s’installer aux commandes…
Un scarabée verdâtre, pataud avec son mufle carré et sa carapace dodue, file sur le sable luisant. L’insecte vrombissant se joue des flaques sombres et des mares vaseuses qui trouent la grève. C’est le Valt 6×6 m, curieux engin hybride, à la fois auto et canot. construit par la société Atnor qui diversifie ainsi sa production, 120 000 attelages et 15 000 remorques par an.
Propulsé soit par le moteur Citroën M28 – dont la simplicité et la robustesse émeuvent encore les nostalgiques de l’Ami 6, de la 2 CV et de la Dyane – soit par un Lombardini 900 cm3 Diesel – au couple idéal – doté d’un incassable châssis métallique en cornières soudées et panneaux pleins qu’habillent des plaques de tôle électro-zinguées et un capot en polyester, muni d’une boîte 4 Citroën dont le célèbre levier surgit entre les deux sièges et se manie… à l’envers, chaussé de gros pneus sculptés profond, entraîné par ses 6 roues qu’animent un vigoureux arbre central et deux chaînes doubles à paliers réglables, cet engin de 580 kilos se conduit comme un char : pas de volant mais deux manettes qui bloquent respectivement les roues droite et gauche. On s’y accoutume très vite, on vire sur place tel un chevronné du tête-à-queue au frein à main. Un régal. Ce n’est pas Jean-Marc Ivens, le pilote nordiste passé de la Samba à la Turbo 16 et participant, pour le plaisir, à cette prise en main bien arrosée, qui nous démentira ! Même si la puissance limitée du Citroën – 29 ch – contrarie parfois la manoeuvre en terrain spongieux. Freiné latéralement, le Valt a tendance à piocher et la mécanique à s’étouffer. Il est donc impératif de s’imposer une seule règle de conduite : pleins gaz en permanence.

voiture à 6 roues
La photo de famille Atnor sur la plage de Dunkerque :
Le 6×6 en versions terre et mer, les 2 auto-cross et le passe-partout.


A l’eau !
Le scarabée vert est hydrophile. Sans modification, il peut patauger dans les marécages. Pour le mettre vraiment à l’eau, en rivière ou en étang, il suffit d’obturer avec deux bouchons les orifices de vidange adaptés au lavage au jet, rusticité oblige. Pour lui faire prendre la mer – pas trop loin quand même si l’on est chargé de famille ! – on lui ajoute deux boudins latéraux, une pipe verticale pour l’échappement et un mini-moteur hors-bord électrique. Ça avance tant bien que mal si le courant et le vent contraires ne viennent pas inverser la progression, métamorphosée alors en marche arrière toutes… Manifestement, le coléoptère préfère retrouver le plancher des Valt. Une rive grimpant à 45° l’effraie pas. Il s’extirpe de l’onde en trépignant de ses trois paires de roues.
Destiné à un usage professionnel en forêt, sur les chantiers ou les sentiers montagneux escarpés, aussi bien que jouet pour les loisirs des grands, le 6x6M est l’œuvre de Jacques Billochon, concepteur imaginatif et homme chaleureux, qui avait déjà construit, voilà 5 et 10 ans, deux prototypes inspirés de véhicules des forestiers canadiens. Son homologation est en cours : Antoine Willot, l’homme qui dirige Atnor à la manière dont on livre un combat, a bien dû se résigner à cette contrainte administrative pour commercialiser dans les meilleures conditions ce curieux radeau à roues né voilà moins de 6 mois. Il n’a pas encore envisagé la même procédure pour les petits frères de cet insecte bourdonnant qui se nourrit de 7 litres d’essence aux 100 km : un 4×2 au châssis identique, baptisé Passe-partout, et qui méritera encore mieux son nom quand il se mettra en quatre ; et deux auto-cross mono et biplace, équipées soit du petit bicylindre Citroën (pour les jeunes pilotes), soit du 4 cylindres des R 14-104-BX.
Deux sauterelles hautes sur pattes, bondissant sur des ressorts-amortisseurs de moto Koni et freinant des 2 ou 4 disques. Impressionnant le plus motorisé, quand il prend de la vitesse, que le vent et le sable brûlent les yeux, que les roues arrière labourent le sol détrempé et que le train avant, affolé, louvoie comme s’il avait totalement oublié la notion de ligne droite…

Mais chaque virage est un plaisir. Appel, contre-appel : on se prendrait pour Salonen ! A n’utiliser toutefois qu’en enceinte privée et avec modération, pour tendance fâcheuse à effecteur des sauts de puce inopinés et tressaillements de libellule qui secouent énergiquement les bras et l’estomac. Peut mieux faire en prenant exemple sur le sérieux de conception du Valt qui, lui, garde les (6) pieds sur terre. Hormis quand sonne l’heure de la baignade, bien entendu.

voiture à 6 roues

Prix indicatifs : Passe-Partout base 28 000 F, 6×6 M base 45 000 F (multiples options), Auto-cross châssis nu 5 000 F, clefs en main 50 000 F environ avec moteur 4 cylindres.
ATNOR – VaIt Industrie, 183, av. A. France 59160 Lomme.

Marc

Fondateur de mm2 France, oto6, puis de Sixmania. Les 6 roues et plus ont toujours été une passion pour moi. Elle a débutée en 1980 grâce à un certain Christian de Léotard, vous connaissez ?

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